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«La poésie n’a plus d’existence publique », constate d’entrée de jeu l’auteur de cette vingtaine d’essais pourtant tous consacrés à la poésie. Mais celle-ci garde certainement ce qu’on pourrait appeler une existence « privée », c’est-à-dire le pouvoir de nourrir toute la vie et toute la pensée de quiconque en a fait sa demeure.
Poète lui-même, Robert Melançon est aussi, et peut-être même avant tout, un infatigable lecteur de poésie, qui trouve son bien partout où naît, à travers des mots, des images et des rythmes inattendus, cet ébranlement du monde et de l’existence, les faisant comme apparaître pour la première fois sous nos yeux. C’est dire que la poésie, pour un tel lecteur – un lecteur qui en a vraiment besoin – ne saurait avoir de frontières ou de définition précise, et qu’il n’existe rien de tel que la poésie « pure » : « J’affirmerais, écrit Melançon, qu’il n’y a de poésie qu’impure, c’est-à-dire qui ne cherche pas à se séparer des autres usages de la langue, qui se fait, tour à tour ou tout à la fois, description, récit, exposé, plaidoyer. Un poème montre, raconte, explique, argumente ou parle simplement sans autre objet comme dans une conversation amicale. » En un mot, il s’adresse toujours à nous.
Que les essais ici rassemblés portent sur Saint-Denys Garneau, Jacques Brault, Paul-Marie Lapointe, Michel Beaulieu, Pierre Nepveu, ou sur des poètes ayant vécu en d’autres lieux ou d’autres temps (Giacomo Leopardi, Étienne Jodelle, Jacques Réda, Robert Marteau), tous expriment une admiration (teintée ici et là de polémique) et relatent une expérience personnelle, un apprentissage : l’apprentissage d’un art, certes, mais aussi d’une manière plus juste et plus humaine de regarder le monde et de « vivre sur terre », même provisoirement.