Aujourd'hui, les otages ne sont plus seulement une monnaie d'échange, un moyen de pression de la part de leurs ravisseurs : ils sont devenus des objets de culte dont la représentation la plus symbolique, en France tout au moins, est Ingrid Betancourt. Or la plupart des Colombiens s'interrogent encore sur les raisons pour lesquelles elle fascine tant les Français. C'est cette surévaluation permanente qui provoque l'altération progressive de l'image qu'on se fait aujourd'hui de l'otage. D'objet de compassion, celui-ci est devenu un sujet de vénération : le symbole de la démocratie mise à mal par l'intégrisme et l'obscurantisme.Si dans l'Antiquité la prise d'otages était considérée comme une garantie de l'exécution d'un traité et figurait en bonne place dans les budgets d'État, les choses ont bien changé. Autrefois politique, l'otage est devenu une monnaie d'échange crapuleuse. Depuis quelques années, on sait que l'otage n'est plus qu'une victime expiatoire dont on peut assister à l'exécution à la télévision. Condamné à mourir pour l'exemple, il est l'acteur malgré lui d'une guerre dévoyée, celui de la " géostratégie-spectacle ".En s'appuyant sur l'exemple de la Colombie ou ce commerce fait rage, mais aussi des cas si différents de Jean-Edern Hallier, Aldo Moro, le Baron Empain, Roger Auque ou Florence Aubenas, Gérard Jaeger dresse un panorama historique et une typologie de la prise d'otages - crapuleuse, politique, terroriste... Il s'attache à comprendre les traumatismes psychologiques causés par un enlèvement, sur les individus comme sur les sociétés fragilisées auxquelles ils appartiennent - ainsi que sur leurs gouvernements impuissants.