Le « néo-libéralisme » en tant que doctrine et mouvement fondés dans le sillage du Colloque Walter Lippmann (1938), se veut une réponse constructive à la crise du libéralisme, et entend de diverses manières en tirer les leçons. Il se nourrit au moins autant de la critique par l'école libérale autrichienne du collectivisme et de la planification que de la façon dont le journaliste Walter Lippmann et d'autres ont tenté d'élaborer ce que The Good Society appelle une méthode de « contrôle social », dans l'horizon d'une économie concurrentielle de marché rénovée. Après le premier volume qui a analysé les ramifications du mouvement « néo-libéral » naissant et son prolongement partiel dans la fondation en 1947 de la Société du Mont Pèlerin, le second volume déplace l'attention sur une nouvelle phase et à partir d'un angle en partie renouvelé.
Beaucoup de questions restent en effet pendantes lorsque les néolibéraux restructurent leur mouvement dans le contexte nouveau de la Guerre froide. Questions épistémologiques, d'abord : sur quels fondements théoriques défendre le libre marché ? Questions programmatiques, ensuite : quelle importance accorder, par exemple, à l'interventionnisme étatique contre les monopoles, et quels sont les correctifs sociaux compatibles avec le marché concurrentiel ? Questions également doctrinales : le libéralisme nouveau doit-il s'hybrider au conservatisme, et de quelle façon ? Questions stratégiques, enfin : les néolibéraux doivent-ils oeuvrer d'abord sur le plan académique, ou doivent-ils investir le champs du journalisme, voire de la politique - à moins qu'il faille combiner ces diverses dimensions ? Et sur quels groupes sociaux et quelles organisations doivent-ils compter ?
Le titre de ce volume, Quel néolibéralisme ?, indique à la fois les très fortes convergences - autour de la défense du libre marché et du système des prix - et les controverses de la nouvelle nébuleuse néolibérale concernant ces enjeux à la fois distincts et partiellement solidaires. Ce faisant, le but de cette investigation n'est certainement pas de conclure que « le néolibéralisme n'existe pas » : il est plutôt de renouveler la réflexion sur le sens des crises fonctionnelles et idéologiques du capitalisme jusqu'à nos jours.