C’est le plus célèbre ouvrage de Leopold Zunz, le texte fondateur du courant de la « science du judaïsme », formule qui dévoile l’ambition de tous les savants participant à cette entreprise : reconstruire, dans l’optique des Lumières, l’histoire d’un passé culturel dans toutes ses dimensions, archéologiques, scripturaires, politiques, spirituelles, sans s’inscrire dans la reconduite pure et simple de la tradition juive. Le courant moderniste s’appuie sur le formidable essor de l’histoire dans l’Allemagne du XIXe siècle, et fait sienne l’ambition de débarrasser le judaïsme de toutes ses adhérences jugées mythiques ou irrationnelles. En procédant ainsi à une objectivation radicale du passé juif, Zunz et ses partisans ont introduit une profonde coupure avec maints aspects de l’histoire juive qui restaient rebelles à cette représentation moderniste, et la « science du judaïsme » va ainsi livrer l’image, abondamment reprise par la suite, d’une culture juive commandée par la raison éclairée, parfaitement à l’aise dans la modernité à laquelle il s’agit aussi de l’adapter le plus rapidement possible. Zunz peut être considéré comme le premier « sociologue » du judaïsme.