L'organisation par l'Église de lieux de sépulture réservés aux chrétiens à partir du milieu du iiie siècle n'est pas aussi solidement établie que le veut la tradition historiographique. Ce constat invite à ouvrir une enquête plus générale sur le rôle de l'Église dans les relations des vivants et des morts à l'époque de l'Antiquité tardive. Ce livre étudie les rapports entre religion et sépulture avec la préoccupation constante de replacer les pratiques des chrétiens dans le contexte des pratiques de leurs contemporains, païens ou juifs.
Les chrétiens ne constituent pas les groupes fermés et hostiles que l'on décrit parfois, et il ne faut pas leur prêter la volonté de rechercher des formes de sépultures communautaires et exclusives. La sépulture ne joue pas de rôle particulier dans la construction d'une identité chrétienne, sauf le soin pris à enterrer les martyrs et le culte rendu auprès de leurs tombes. Jusqu'à la fin du ve siècle au moins - limite chronologique ici retenue -, l'Église laisse en dehors de son champ ce qui concerne la sépulture des morts et même, pour une très large part, leur mémoire. Cela pose le problème de l'autorité des évêques et de ses limites, mais permet aussi de dessiner les contours d'un christianisme spécifique à l'Antiquité tardive dans lequel existe une large sphère profane.