Rothko « La peinture réduite à elle-même : des couleurs sur une surface, l'absolu de la peinture et une peinture absolue. Silencieusement. Le matériau porté à l'incandescence. Le symbolique pur de toute signification, objet, image. Quelques plages de couleurs : la lumière qui en émane, irradie d'elles comme l'obscurité qui les hante, inconnue, inconnaissable. »
Tels sont les premiers mots de ce texte lumineux consacré à l'oeuvre de Rothko, dont on comprend qu'elle ait fasciné Ishaghpour, puisqu'elle incarne l'impossible mariage entre une tradition juive intériorisée qui interdisait les images et la peinture dont l'histoire même magnifie l'image. Rothko n'était pas destiné à devenir peintre. Son initiation à la peinture prend la forme d'un parcours de misères. Mais ses rencontres avec Newman, Still, De Kooning, dans une Amérique en quête d'affirmation par rapport à la peinture européenne, lui permettront de réaliser sa recherche d'absolu en créant une épiphanie visible de la lumière qui n'est pas avant les couleurs mais en elles. C'est précisément sur cet aspect crucial de son oeuvre que s'attarde cet essai grandiose, indispensable, qui ne cherche pas tant à lever « le voile » sur une peinture profondément tragique qu'à le rendre visible.