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Raoul Girardet est certainement le plus discret de nos grands historiens. Ses interventions publiques sont rares, et sa bibliographie sans commune mesure avec son aura. Car, de tous les piliers de « Sciences Po », il est sans aucun doute l’un des professeurs dont l’influence est la plus durable, et l’empreinte la plus profonde, sur les milliers d’étudiants qui ont suivi son enseignement. Sa spécialité ? La France en quelque sorte. Mais la France de Girardet, c’est d’abord celle d’un historien du nationalisme, de la société militaire et de l’idée coloniale. Trois thèmes qu’il n’a cessé d’approfondir tout au long de ses quarante années d’enseignement à la Sorbonne, à l’Institut d’études politiques, à l’École de guerre, à l’ENA, à Polytechnique... Trois thèmes, autour desquels il ne cesse de tourner dans ces entretiens conduits par Pierre Assouline, et à l’occasion desquels il a accepté - pour la première fois - de se pencher sur sa propre histoire : celle d’un ancien jeune militant d’Action française, pris dans le maelström de l’entre-deux-guerres, puis happé par l’activité Résistante dans le Paris des années noires. Par deux fois, il fait l’expérience de la prison : dans les derniers mois de l’Occupation allemande, et dans les derniers temps de l’Algérie française. Membre actif de l’OAS, il refuse les lâchetés, mensonges et palinodies artificielles. Face à cette nouvelle débâcle, il est de ceux qui prônent une nouvelle résistance. Avec un franc-parler, une ironie discrète, et une élégance de ton dont il est coutumier, Raoul Girardet se raconte et regarde son siècle. Souvent marginal, toujours non conformiste, jamais complaisant, singulièrement libre, ennemi des tabous, cet homme de droite, fier de son état, ne renie rien des valeurs qui l’ont fait : honneur, fidélité, tradition... Cette subtile autobiographie, émaillée d’évocations d’amis proches (Jacques Laurent, Philippe Ariès), de maîtres (Pierre Renouvin), de maîtres à penser (de Maurras à Raymond Aron), d’étudiants devenus célèbres (Attali, Chevènement, Fabius), de milieux longtemps fréquentés (l’Université, l’Armée), est aussi une méditation sur une certaine idée de la France.