Solo
Ulrich, un vieil homme bulgare, a raté sa vie : musicien d'abord, puis chimiste - ses deux passions -, il a vu ses espoirs écrasés lorsqu'il a dû rentrer dans son pays, son père étant ruiné et ne pouvant plus lui payer ses études. Soixante-dix ans plus tard, il vit toujours en Bulgarie, alors dans les décombres de l'ère post-communiste, dont Rana Dasgupta donne des descriptions cruelles et convaincantes.
Mais les « rêves éveillés » d'Ulrich, qui occupent toute la seconde partie du livre, vont le tirer de son marasme : le voici sauvé par le pouvoir de l'imaginaire, qui le transporte aux États-Unis. Ses visions et pérégrinations offrent alors un saisissant contrepoint au récit morne d'une vie frustrée. Est-ce pour autant un univers paradisiaque qu'il découvre ? Des péripéties extraordinaires, dignes des Mille et Une Nuits, ne voilent pas tout à fait l'autre face d'une réalité où tout nous parle d'une motivation unique : le succès, l'argent, la richesse.
Rana Dasgupta possède la capacité de donner vie à ses personnages et à ses situations : il en fait des évidences, si bien que le lecteur est prêt à le suivre. Sa langue est inventive, son imagination, débridée, son art de conter, magnifique : la lecture de ce livre est aussi séduisante qu'instructive.