Nadejda Mandelstam écrivit ce livre de souvenirs sous le coup de la mort d'Anna Akhmatova en 1966, après la rédaction du premier tome de Contre tout espoir, consacré à son mari. Elle l'avait ensuite détruit pour écrire, dans une tout autre tonalité, les tomes II et III de ses mémoires. Un tapuscrit, conservé par une amie des Mandelstam, a permis la publication à Moscou de cet inédit en 2006.
« Ce qui caractérise Akhmatova, c'est la recherche de l'exploit, du renoncement, le refus de ce qui est terrestre au nom d'un but supérieur. Ce qui nourrit sa vie, ce sont les catégories morales, pas les sensations ni l'ontologie. Et il y a dans sa voix intérieure un élément de compassion, de souffrance éprouvée en commun avec les hommes : "J'entends comme des voix inconnues et captives, comme des plaintes et des gémissements" qui annoncent "un bruit qui domine tous les autres". Marina [Tsvétaïeva], dans ses poèmes, a refusé le principe féminin - c'est un poète de la force, elle est extrêmement active. A[nna] A[khmatova], elle, conserve une nature féminine passive et, en tant que femme, elle trouve dans la compassion sa voix la plus profonde. »
Nadejda Mandelstam,
Sur Anna Akhmatova, 1966