En 1529, à Vérone, Giangiorgo Trissino faisait paraître la première traduction
en langue italienne d'un texte de Dante alors quelque peu oublié,
le De vulgari eloquentia, composé par l'illustre Florentin vers 1305. Ce
dense petit traité est un plaidoyer implacable en faveur de la légitimité de
l'usage de la langue vulgaire italienne dans la littérature, un volgare illustre,
cela va sans dire, limé par les plus grands intellectuels d'Italie. Or, lorsque
la traduction de Trissino paraît, le débat sur la langue est, dans la péninsule,
l'une des préoccupations majeures des érudits : Bembo, Castiglione,
Machiavel, Speroni participent activement à ce débat polémique, tout
comme Trissino qui a publié en 1524 une Epistola adressée au pape
Clément VII dans laquelle il propose l'ajout de lettres nouvelles destinées
à mieux décrire les sons de la langue italienne. Sur-le-champ, en cette
même année, Firenzuola, dans un bref pamphlet cinglant teinté de dérision,
éreinte la démonstration de Trissino au profit d'un italien fondé sur
le seul toscan. C'est dans ce contexte que Trissino publie sa traduction de
Dante ainsi qu'un dialogue, Il Castellano (1529) qui défend l'idée d'une
langue issue de l'ensemble des dialectes italiens, épurée, polie, dans le
droit fil, estime-t-il, du De vulgari.