Le torture porn désigne depuis les années 2000 un sous-genre
du cinéma d'horreur et d'exploitation apparu depuis longtemps
déjà. Il s'agit d'histoires où des victimes sont soumises
à toutes sortes de brutalités et autres atrocités dont l'issue
leur sera généralement fatale. Vilipendé par la critique mais
commercialement fructueux (voir la franchise Saw, le succès
des Hostel...), le torture porn a relancé le débat sur la prétendue
nocivité du cinéma d'horreur. Considéré comme le véhicule
des pulsions sadiques et misogynes de ses auteurs et de son
public, il demeure trop méprisé pour avoir fait l'objet d'une
étude objective et approfondie dans notre pays. Cet ouvrage
propose d'explorer les enjeux et les thèmes du sous-genre. Il
remet ainsi en cause certains principes du féminisme radical
et d'une pensée politiquement correcte qui tendent à l'aseptisation
du cinéma horrifique. Le torture porn, héritier d'une
tradition subversive du cinéma d'exploitation, y est envisagé
comme le vecteur d'une sensibilité postmoderne empreinte
de scepticisme envers les valeurs morales, politiques et culturelles
en vigueur. Il questionne la validité du modèle patriarcal
et redéfinit les enjeux de la féminité en offrant de mémorables
portraits de femmes violentes et en dépeignant une masculinité
en crise. Lieu de l'instabilité, de l'incertitude et de la
déconstruction (des corps comme des concepts), le torture
porn se dérobe aux notions établies de bien et de mal, de
conservatisme et de progressisme, de haute culture et de sous-culture,
pour jongler avec les paradoxes et les diversités. Il restitue
au cinéma d'horreur sa force brute de questionnement et
ses vertus d'inconfort.