Le style de Gay Talese est reconnaissable entre tous. Dandy qui aime se présenter coiffé d'un fédora, il porte une attention tout aussi grande à la confection de ses phrases qu'à celle de ses costumes. À croire ce fils de tailleur calabrais, c'est dans le magasin tenu par ses parents, en écoutant les confidences que les clientes faisaient à sa mère, qu'est née sa vocation d'écrivain, son goût du détail et des bonnes manières. Ainsi, on n'interrompt jamais quelqu'un qui se livre. Prenons acte. Dans ce recueil de quelques-uns de ses meilleurs reportages parus des années 1960 à nos jours, on entend aussi bien la voix de ses parents que celles du crooner Tony Bennett ou du parrain de la mafia Joe Bonanno, que le bruit des machines à écrire du New York Times d'antan, en somme la cacophonie harmonieuse du réel, toujours différent, toujours inventif, toujours surprenant. Chambre d'écho du monde, l'observateur disparaît derrière son sujet, car comme il aime à le rappeler « un bon journaliste est une personne multiple, un schizophrène ».