Trois révolutions de la liberté propose les éléments d'une histoire politique comparée
des trois grandes traditions politiques - anglaise, américaine, française -, d'où
est sorti le monde de la «démocratie libérale».
La voie anglaise doit d'abord être comprise à partir des particularités du droit
anglais, qui a fait naître un type original de rationalisation du droit et du pouvoir
étatique. Elle s'est traduite aussi par une histoire religieuse originale et par la
découverte précoce de ce que les divisions partisanes pouvaient apporter à une
société libre.
Depuis Tocqueville, les États-Unis apparaissent classiquement comme le laboratoire
de la démocratie moderne, dont les effets se déploieraient pleinement du fait
de l'absence d'héritage aristocratique et de la prédominance de l'esprit «démocratique»
sur l'esprit «révolutionnaire» ; mais l'Amérique a dû elle aussi affronter,
au moment de la guerre de Sécession, une crise violente qui a fait apparaître des
oppositions comparables à celles qui ont déchiré la France révolutionnaire et c'est
des États-Unis démocratiques que sont sortis, à la fin du XXe siècle, de nouveaux
courants radicaux.
Avant d'être celle de la Terreur, la Révolution française est celle des droits
de l'homme mais, comme l'avait bien vu Hegel, son développement heurté et
tragique peut lui-même être interprété comme l'expression d'une dialectique
qui est déjà présente dans les principes et dans le «superbe lever de soleil» de
1789. Pour le meilleur et pour le pire, la démocratie française est donc bien
toujours l'héritière de la Révolution - et de l'Ancien Régime : on verra ici que, sur
des questions non négligeables pour l'humanité moderne, cet héritage violent
a pu aussi être la source d'une modération paradoxale, et d'une version civilisée
du progrès démocratique.
L'histoire des révolutions démocratiques est donc une histoire vivante, et l'inépuisable
dialogue entre les traditions qui en sont issues est une des conditions de
notre liberté.