Samouraï. La seule évocation de ce mot, reste intact dans presque toutes les langues du monde, suffit à susciter un puissant imaginaire, peuplé de héros en armures laquées de jais, sabres au côté, mus par le bushidô, le code du guerrier, ou encore de spadassins au visage balafré. Depuis plus d'un siècle, l'Occident s'est pris de passion pour le guerrier insulaire, devenu d'abord l'emblème de la singularité nippone et des ambitions du jeune État moderne japonais, puis celui de sa spectaculaire renaissance des cendres de l'apocalypse nucléaire. Une abondante production littéraire, relayée par un foisonnement d'oeuvres cinématographiques, a nourri cet engouement, les auteurs ne s'autorisant toutefois que très exceptionnellement un léger pas de côté en dehors de cet univers martial.
En réalité, figure multiple et protéiforme, le samouraï - « celui qui sert » - s'est fait au fil de l'histoire pirate, brigand, soudard, voire bonze. Raison pour laquelle, qu'il inspire la crainte, le dégoût ou l'admiration, il suscite des sentiments contrastés. Symbole de droiture et d'abnégation, il est en effet aussi porteur d'une culture de la violence, et même adepte d'un culte de la mort. Spiritualité, diversité des trajectoires, relation aux arts, sexualité sont dès lors autant de facettes méconnues que Julien Peltier explore avec brio au gré d'un périple à travers les âges. Et notamment en donnant la parole aux autres groupes sociaux afin d'interroger leur perception de cette élite combattante, qui imposa sa suprématie en premier lieu par la force avant de s'efforcer de la justifier en s'érigeant en modèle. C'est là le propos de cet ouvrage passionnant, décliné au travers d'une approche chrono-thématique s'étendant sur plus d'un millénaire, depuis les origines du guerrier japonais jusqu'aux ultimes récupérations de son idéal revendiqué au siècle dernier.
L'ouvrage de référence.