Lorsqu’on reconstruit le processus historique de consolidation de la pensée sociologique au XIXe siècle, on ne consacre habituellement qu’une attention sporadique au thème de la sexualité, de l’érotisme, de l’intimité amoureuse. Il s’agit là d’une dimension moins connue de l’histoire des sciences sociales, qui eut cependant une importance fondamentale : l’effort pour penser l’amour et le sexe du point de vue sociologique joua un rôle significatif dans les premières réflexions sur les conséquences de la modernité dans les sociétés occidentales. À partir du projet utopique de l’amour libre de Fourier, en passant par les réflexions de Tocqueville sur les sociétés démocratiques, par les projets réformateurs socialistes, pour arriver aux analyses de la sphère érotique de Weber, Simmel et Tarde, la sociologie naissante contribua tôt à l’étude du rôle et de l’impact de la sexualité et de l’intimité érotique sur le fonctionnement de la société moderne.