L'invention du bivouac, la compréhension des avalanches, le contrôle progressif du vertige dès le XVI e siècle, des portraits comme ceux de Tita Piaz ou Comici... L'éventail des sujets est large. Le lecteur averti traverse les Alpes avec une grande curiosité, à la manière de Gilles Modica.
L'alpinisme, c'est l'approche et l'exploration des Alpes, la conquête de ses cols, crêtes et sommets en toutes saisons. C'est aussi le frisson du vertige, la tentation du vertige, la jouissance du vertige, la conjuration du vertige. Pente de l'imagination, défaillance qui paralyse, le vertige est le thème dominant d'une littérature de témoignages qui commence dès la fin du XVIIIe siècle. Oberman, le héros autobiographique de Senancour, jouit déjà de sa frayeur et de son isolement dans un récit d'ascension vers la dent du Midi (1789).
Il faut aller aux sources, et c'est ce que Gilles Modica a fait pour écrire ces chroniques sur les rêveurs des Alpes, tous saisis par la beauté d'un univers de cimes où ils ont suspendu leur vie avec plus ou moins de bonheur. Même Ruskin, contemplatif pur, marche au plus près des Aiguilles de Chamonix. L'alpinisme, c'est la dalle du bivouac et la surprise d'un réveil à l'âge de pierre, les yeux sur la Grande Ourse. L'alpinisme, c'est le rêve de l'escalade et la rage de l'escalade. L'alpinisme, c'est ce désir de chanter qui monte aux lèvres d'un Comici lorsqu'il grimpe en solo intégral dans la face nord de la Cima Grande. L'alpinisme, c'est l'allégresse d'un homme qui a oublié sa peur et son vertige dans l'aisance de ses gestes.