« J’ai entrepris, vous voyez, d’écrire non seulement ma vie, mais mes opinions aussi, dans l’espoir et l’attente que, apprenant par l’une mon caractère et l’espèce de mortel que je suis, vous en goûteriez mieux les autres. À mesure que nous ferons route ensemble, cette légère connaissance qui commence entre nous se changera en familiarité ; et celle-ci, à moins qu’il n’y ait de la faute de l’un de nous, se terminera en amitié. – O diem præclarum ! – Alors rien de ce qui me touche ne sera jugé futile de sa nature ou ennuyeux dans mon récit. C’est pourquoi, mon cher ami et compagnon, si vous me trouvez quelque peu économe de ma narration au début du voyage, – résignez-vous, – laissez-moi continuer et raconter mon histoire à ma manière ; – et si de temps en temps j’ai l’air de m’amuser en route, – ou que parfois, chemin faisant, je me coiffe d’un bonnet de fou à clochettes, pour un ou deux instants, – ne vous enfuyez pas, – mais plutôt ayez l’obligeance de me croire un peu plus de sagesse qu’il n’en paraît à l’extérieur ; et, tout en avançant, riez avec moi, ou de moi, – en un mot, faites ce qu’il vous plaira, – seulement ne vous fâchez pas. »