En quoi Vincente Minnelli a-t-il inventé une des grandes oeuvres
du cinéma ? Pour répondre, il faut étudier tous ses films : les
comédies musicales passées à la postérité (Un Américain à Paris,
Tous en scène...), les comédies connues (Le Père de la mariée, La
Femme modèle...) et moins connues (La Roulotte du plaisir, Qu'est-ce
que maman comprend à l'amour ?...), les mélodrames réputés (Comme
un torrent, Celui par qui le scandale arrive...) ou maudits (Les Quatre
Cavaliers de l'Apocalypse).
Le détail des films importe, et plus largement l'évolution d'un
itinéraire commencé en 1943 et achevé en 1976. Le rêve a sa place
dans cette histoire, mais pas plus que la rêverie, la prière, la
télépathie ou l'oubli. La danse y tient son rôle, ô combien, mais
aussi la littérature, la télévision, l'enfance ou la guerre. La chronique
légère du Chant du Missouri finit ainsi par s'effacer sous le
galop des cavaliers de l'Apocalypse dans le ciel de l'Occupation.
Il est temps d'arracher l'enfant chéri de la Metro-Goldwyn-Mayer
à sa réputation d'esthète sans profondeur, pour saisir les rythmes
et les périodes d'une inspiration qui se sera épanouie dans le
grandiose aussi bien que dans le gracieux.