A Tananarive, sur la décharge d'Andralanitra, la survie de chacun dépend de la fouille quotidienne des immondices. A la suite du travail de Martine Camacho, les auteurs de cette étude ont observé les conditions de vie, les pratiques, écouté les préoccupations de ces proscrits. Cette étude s'est réalisée grâce au soutien du Père Pedro, père lazariste, qui vit et travaille auprès de cette population. Le déchet constitue non seulement le moyen de vivre et de survivre mais aussi est source de divers maux, nuisances d'ordre sanitaire et d'affections multiples pour les habitants. Brigitte Le Lin a entrepris alors de restituer les stratégies de survie dans ces conditions, montrant à quel point mères et enfants sont les premiers exposés et touchés. L'étude menée conjointement avec Cyrille Harpet, anthropologue, a permis d'élargir la problématique à la dimension culturelle spécifique à Madagascar en intégrant les aspects symboliques liés à la perception et à la représentation de la saleté et de la souillure. En effet, dans les conditions de la décharge, le maintien de soi, les pratiques du corps, d'évitement de la souillure sont autant exercés pour dissiper les méfaits des ordures que l'éloignement des mauvais esprits susceptibles de les occuper. L'étude de terrain d'un anthropologue et d'une infirmière a permis de faire se croiser ici une description précise du quotidien des occupants de la décharge d'Andralanitra, de leurs préoccupations, de leurs pratiques de fouille des ordures, des risques encourus, des maux et agressions endurés, des perceptions et représentations spécifiques de la culture malgache. Si la problématique «santé-déchets» implique nécessairement des aspects sanitaires et médicaux, la dimension humaine et la culture dans laquelle s'inscrit la population concernée sont ici restituées dans leur richesse, dans leur complexité, dans leur fragilité.