Le poète, selon Goethe, atteint au plus haut degré de l’art lorsqu’il rivalise avec la réalité, c’est-à-dire lorsque ses tableaux sont tellement animés par l’esprit, que chacun croit les avoir sous les yeux. À son plus haut point de perfection, la poésie paraît toute extérieure ; plus elle se retire dans le monde intérieur, plus elle est en danger de se perdre. Représenter le sentiment intérieur sans le revêtir d’une forme matérielle empruntée au monde extérieur, ne pas animer et spiritualiser la forme extérieure, sont les deux extrêmes par lesquels on entre dans la prose. Ce qui manque à la plupart de nos jeunes poètes, c’est que les sentiments personnels qu’ils expriment n’ont pas assez d’importance, et qu’ils ne savent pas trouver des images dans le monde qui les entoure. Dans les cas les plus favorables, il leur arrive de trouver des formes qui traduisent fidèlement leur pensée et répondent à la situation de leur âme ; mais saisir des images pour elles-mêmes, parce qu’elles sont poétiques, et lors même qu’elles ne seraient point en harmonie avec notre disposition intérieure, c’est à quoi ils ne songent pas... - -
Des conseils aux jeunes poètes, avec les réflexions de Goethe, Rainer Maria Rilke, Sully Prudhomme (prix Nobel de littérature), Jonathan Swift.