Cure-Bissac : entendez Crève-la-Faim, qui ne peut vivre qu'en raclant jusqu'à la dernière miette le fond de sa besace. Ce fut d'abord le sobriquet de Désiré Simoneau, figure tutélaire de ménétrier pauvre et bohème. Son petit-fils, Élie - lui-même tâcheron et violoneux dans les noces, élu directeur de la musique municipale - transposera l'existence cahotique mais libre de son grand-père dans une symphonie à sa gloire et à la gloire de tous les siens, « culs-terreux, mangeux d'ail », symphonie rustique qu'il intitulera simplement Cure-Bissac. Cela n'ira pas sans aléas face aux moqueries des notables de Richelieu, la petite ville de Touraine où l'action se déroule, et à l'incompréhension de sa propre classe. Il sera cependant encouragé et soutenu dans son projet un peu fou par un personnage haut en couleur, noble ruiné au franc-parler savoureux, tout acquis à sa cause.
Georges David (1878-1963), lui-même musicien, excellent cornettiste, fut le chef de musique, durant toute l'entre-deux-guerres, de l'Harmonie municipale de Mirebeau-en-Poitou, où il exerçait la profession d'horloger : on devine dans ce roman, par ailleurs minutieux document sur la vie provinciale autour de 1900, une belle part d'autobiographie, une fable aussi, quelque peu amère, sur ce que peut devenir une vocation individuelle face aux dures réalités sociales.