La solidarité est au coeur de nos relations sociales, elle habite notre manière de «vivre ensemble», et pourtant elle semble impalpable, échappant à nos définitions. Est-elle liée à un intérêt, ou à un élargissement de la générosité? De nombreux auteurs, comme J. Rawls ou J. Habermas, ont bien tenté, non sans mal, de penser la solidarité à partir de l'exercice post-moderne de la liberté et de l'égalité. Il faudrait alors, partant de l'individu, arriver à renouer les relations avec Autrui, et sauver autant que possible sa dimension sociale. Or il n'est de solidarité sans une communauté préalable qui l'abrite et l'incarne. C'est pourquoi la démarche inverse, qui part des différentes manières qu'ont les personnes de nouer des relations entre elles, est plus fructueuse.
Cette voie, initiée par Edith Stein, reconstruit à partir d'une riche anthropologie les différents liens interpersonnels qui s'offrent à nous. Elle permet de proposer divers degrés de solidarité, selon les liens communautaires qui unissent les êtres humains [la famille, l'école, le peuple, la nation, etc.]. Cette approche prend un relief particulier dans des sociétés marquées par le pluralisme, où l'État doit garantir à la fois la liberté de chacun et le bien commun nécessaire à la concorde sociale. D'où l'importance de la formation et de la culture, qui contribuent à enrichir les liens unissant les citoyens, d'où aussi la recherche de la juste articulation entre la communauté étatique et les religions.