Débarqué
« Il avait tellement pris l'habitude de voyager à l'instinct que c'en était devenu une seconde nature. Mon père multipliait les virées en terres étrangères sans jamais quitter ses pénates. [...] Il détalait en compagnie des écrivains de plein air et des marins débarqués. Il montait à bord des bateaux qui étaient amarrés dans sa tête. Regardait droit devant. Levait sa casquette à visière ornée d'une ancre de marine dorée en passant de l'autre côté de la ligne d'horizon.
Au fil des ans, le lien qui s'était discrètement tissé entre nous n'a cessé de s'affermir. Il s'est nourri de faits subtils, graves ou anodins, de moments de bonheur et de drames sans nom. Il s'est étoffé en courant sur plus d'un demi-siècle. Il doit beaucoup à nos lectures, à nos solitudes, à nos dialogues et à nos silences.
À la disparition de son père, les souvenirs de l'auteur affleurent et l'invitent à raconter l'histoire de ce « voyageur empêché ».
Habité par des rêves d'aventures et de longues traversées, ce jeune Breton voit ses aspirations anéanties lorsqu'il tombe malade à l'âge de dix-sept ans. Il devient alors un « débarqué », un homme condamné à rester à quai. Lui restent les récits des matelots rentrés au port, et les livres, en particulier ceux de Caldwell et de Steinbeck, grâce auxquels il transmettra à l'auteur le goût de la lecture et des mots.
Débarqué est le portrait d'un homme et celui d'une époque, d'un monde peuplé de personnages, souvent déclassés, en bout de course. Ce récit est aussi celui de leur histoire, leur quotidien, dans les terres comme en mer.