Entre ici et là-bas
Le pouvoir des femmes dans les familles maghrébines
Destiné à un public large intéressé par les questions de l'immigration et du féminisme, cet ouvrage pourra aussi servir très utilement aux professionnels du social, du secteur de la santé, de l'éducation nationale» confrontés à ce qu'on désigne souvent à tort comme des « problèmes de culture », sur lesquels il jette un regard novateur Hakima Nounir est maître de conférences en
sociologie a l'université de Paris Est Créteil, chercheure au laboratoire Circeft-Rev. Les révolutions arabes en Egypte, Tunisie, Libye ont mis sur le devant de la scène politique des millions de femmes (et d'hommes) revendiquant la liberté, l'égalité et la démocratie et fait voler en éclats l'image de femmes par définition soumises que des stéréotypes tenaces entretenaient à leur égard. On peut constater aujourd'hui que les femmes qui ont été aux avant postes de ces révolutions, en sont en partie les grandes perdantes dans les pays où l'islamisme « modéré » ou non est devenu politiquement majoritaire. Par ces mêmes mouvements, les représentations unitaires et homogènes « de la femme du Maghreb » ont été balayées, pour faire place à des
conceptions beaucoup plus contrastées où s'affrontent « plusieurs sortes de femmes », avec ou sans voile, laïques ou croyantes, militantes islamistes ou non, instruites ou pas.
L'ouvrage de Hakima Mounir explore dans le détail cette diversité, à partir d'une enquête menée au Maroc, en France et aux Pays-Bas, afin de saisir ce qui, au-delà des apparences qui mettent en scène un pouvoir masculin apparemment sans partage,
constitue un pouvoir féminin méconnu, basé sur des stratagèmes et des ruses qui ne sont pas sans lien avec les traditions des Mille et une nuits.
Loin des perspectives culturalistes, cette analyse montre comment l'intérieur et l'extérieur de la sphère domestique sont étroitement liés, et que le fait de vivre en France ou aux Pays-Bas donne aux femmes qui s'en saisissent la possibilité d'accroître leur pouvoir. L'une des originalités de cette enquête est d'avoir réussi à aborder même les secrets les plus intimes,
qui concernent la sexualité, la magie et la sorcellerie, employés comme armes pour « grignoter » du pouvoir. L'intime rejoint ainsi le public, les secrets privés la sphère politique. On comprend mieux, par les « bénéfices secondaires » que certaines femmes tirent de leur situation domestique, ou à l'inverse la mise en cause de l'autorité du mari et des fils par d'autres
femmes, certains des ressorts des révoltes mais aussi des conservatismes qui agitent les pays du Maghreb.
Destiné à un public large intéressé par les questions de l'immigration et du féminisme, cet ouvrage pourra aussi servir très utilement aux professionnels du social, du secteur de la santé, de l'éducation nationale, confrontés à ce qu'on désigne souvent à tort comme des « problèmes de culture », sur lesquels il jette un regard novateur.