Hâfez éternel
Ivresse et vignes
Le poète iranien Hâfez (XIVe siècle de l'ère chrétienne) incarne d'une certaine manière le sommet de la langue et de l'imaginaire poétique persans car il parvient à la porte de l'ineffabilité. Poète universel et conquérant, oiseau sauvage de la culture persane, il donne en parfait Narcisse une image divine de lui-même par la densité de son expression. Le concept d'amour formé chez Hâfez dépasse la compréhension lyrique et mystique. L'amour est l'accomplissement de l'infini, il parcourt les dangers insolites du monde. Le poète déchiffre la nature, creuse la terre et fait de la ruine l'emblème d'un naufrage perpétuel. Hâfez étant une exception, il ne peut être enfermé, ni dans sa passion individuelle, ni dans la structure sociale d'un temps donné. Sa poésie est un manifeste de la langue persane qui, en de multiples dimensions, transgresse les moeurs de ceux qui veulent une cité humaine sans confusion.
La traduction inachevée des poèmes lyriques de Hâfez, 175 ghazals, par Jean-Arthur Guy se voit ici rééditée dans une version bilingue. Ce dernier voit en lui un soufi christianisé dans le sillage de l'érotisme antique. Le caractère désuet de sa traduction parfois surprenante est contrebalancé par l'audace de son objet même.