La carrière de Bouasse coïncide presque avec la durée de la troisième République. Ses domaines de recherche successifs : les phénomènes irréversibles (frottement, viscosité, hystérésis...), l'acoustique et la mécanique des fluides furent occultés par l'émergence de la physique moderne et ont peu retenu l'attention des historiens.
Aux environs de 1900, physiciens et philosophes constatent que l'accumulation des connaissances a rompu l'unité de la physique, les réflexions sur la valeur des théories physiques se multiplient, Bouasse y contribue. Il est le spectateur de l'émergence de nouvelles théories et, s'il récuse la relativité, il recourt - lorsque l'interprétation des phénomènes l'exige - aux derniers développements des physiques statistique et quantique, celles de Planck et de Bohr.
Bouasse est l'auteur d'une collection d'ouvrages pour l'enseignement des lycées et collèges, pour l'enseignement de la licence et de l'agrégation, de deux ouvrages de mécanique : Mécanique rationnelle et expérimentale, Mécanique physique, dans lesquels il prend le contre-pied de la physique mathématique enseignée par des mathématiciens « qui idolâtrent l'abstraction et la généralisation et ont le réel en horreur » et des 45 volumes de sa Bibliothèque scientifique de l'ingénieur et du physicien dans lesquels les rapports des sciences théoriques et appliquées sont parfaitement réglés.
De son oeuvre, on a surtout retenu le tableau qu'il brosse de l'Université « Eh quoi ? [écrit E Wallon au Bulletin de l'Union des physiciens] Est-ce vraiment ainsi que vont les choses dans l'Université ? Un personnel sans intelligence et parfois sans conscience, un enseignement sans valeur, des examens sans garanties, est-ce bien tout ce que la vieille dame peut offrir à la jeunesse de France ? » Mais Bouasse n'est pas qu'Alceste, il est aussi Don Quichotte lors de ses attaques de « l'Administration » et là « nous y rencontrons [écrit encore Wallon] des conceptions très hautes, des appréciations fort justes, des leçons qui nous pourront être extrêmement profitables » : Réformateur fougueux, Bouasse critique l'encyclopédisme des programmes qui donne l'illusion d'une culture et voudrait que les programmes ne s'attachent qu'aux méthodes propres à chaque science. Elitiste, il plaide que soit substituée la sélection par l'intelligence à la sélection par l'argent et réclame l'accès de l'Université aux titulaires du brevet supérieur, dénonçant des discours républicains qui couvrent des intérêts de caste. Principal acteur de l'introduction des sciences appliquées à l'Université, il dénonce la multiplication et la dispersion de ces enseignements qui produisent leur complet abaissement ; ici les propos de Bouasse font écho à ceux qu'en leurs temps. Cousin, Renan et d'autres eurent devant la dispersion des Universités. Enfin, à contre-courant, Bouasse dénonce ces scientistes qui confondent le progrès scientifique et le progrès de l'esprit humain et qui lient le bonheur de l'Humanité au progrès des techniques...