Ce que nous savons de la littérature latine et qui nous est présenté dans un cadre
chronologique impeccable est une construction, une appropriation, fruit d'une conquête
héroïque : des oeuvres arrachées au néant par le travail des copistes, retrouvées par
les Pétrarque, les Poggio Bracciolini, infatigables chasseurs de manuscrits, rendues à
leur vérité textuelle et historique par des philologues brûlant de l'ardor eruditionis,
diffusées par les éditeurs, les traducteurs ; constamment réinterprétées, réinventées
à travers une longue série d'aléas et de débats passionnés qui réactualisent le canon,
débats qui dépassent l'académie, enflamment la République des Lettres, mobilisent
notamment ces lecteurs privilégiés que sont les grands écrivains. Aussi ces pages, qui
racontent l'histoire de cette histoire, offrent-elles, à côté de Virgile et d'Ovide, à côté
de Politien, de Juste Lipse, de Lachmann, les noms de Montaigne, Hugo, Laurent
Tailhade, Huysmans.
Rendu possible par les nombreux travaux qu'a suscités, par delà l'Humanisme,
l'intérêt porté à l'histoire de la réception, le point de vue choisi commande
l'organisation du livre. En premier lieu, détachés des autres par leur oeuvre polyvalente
et réunis sous le titre, repris à Dante, de «La Bella scuola», quatre noms qui n'ont
jamais disparu de l'horizon, astres majeurs au «ciel» de la littérature latine : Virgile,
Cicéron, Horace, Ovide. Suivent, vaste zodiaque, les représentants des principaux
genres de prose et de poésie : Philosophie (Lucrèce, Sénèque, les Platonismes),
Histoire, Théâtre, Roman, les Genres poétiques (Épopée, Élégie, Satire, Épigramme,
Fable et Silve, les Poètes «mineurs»), Épistoliers et Orateurs et enfin Théorie de
l'éloquence. Une troisième partie est consacrée à la Littérature technique (Pline,
Vitruve, etc.) et érudite (les polygraphes, les grammairiens). Écrit sous la plume
savante et sensible de Pierre Laurens, enrichi de nombreux extraits en traduction,
l'ouvrage se clôt par une quatrième partie consacrée à cette poussière d'étoiles qu'on
appelle la «Littérature latine inconnue».