C'est pendant la Renaissance que s'approfondit l'intérêt que l'on porte au rire et à la dérision, mais aussi que l'on voit se dérouler dans la littérature le tableau bariolé des humeurs de l'individu. Saturne, l'astre qui préside à la mélancolie, n'y est pas moins présent que Momus, le dieu de la moquerie. D'où le titre Humeurs et Paradoxes que nous avons donné à ce florilège de textes du conteur florentin Anton Francesco Doni qui, au cours du xvie siècle, a su évoquer avec verve et passion toutes les ressources créatives d'un imaginaire appliqué aux objets-symboles de ses obsessions : le monde, le temps, la Folie, l'Histoire, l'homme, la Société, la parole ; Riche d'une immense culture à la fois populaire et savante, Doni entend certes divertir son lecteur, mais aussi et surtout le provoquer, le « réveiller », afin de lui faire prendre conscience de soi et, par là même, lui faire découvrir son irréductible singularité.