Pourquoi la guillotine est-elle abominable ? Et de quoi au juste
a-t-on horreur ? Pour répondre, Daniel Arasse interroge
cette peur à sa source, au moment où, à peine née, la machine
est plantée au coeur d'une exploitation spectaculaire de
ses pouvoirs d'épouvante : la Terreur.
Les surprises se multiplient au fur et à mesure de l'enquête :
Guillotin n'est pas pour grand-chose dans l'invention
de la guillotine ; à l'exception de la France, l'Europe l'utilisait,
presque identique, bien avant la Révolution ; la tête coupée
semble vivre encore, défiant véritablement la médecine...
Machine politique, la guillotine fonde la démocratie : «Tout
condamné à mort aura la tête tranchée.» De la médecine
à la politique et à la métaphysique, la machine à décapiter
se révèle à la fois un «objet de civilisation» et une image
de la Révolution dans sa phase la plus radicale, en exhibant
aux yeux du peuple, dans un fascinant théâtre macabre,
l'égalitarisme le plus absolu.
Ce livre ne cherche pas à réhabiliter la guillotine jacobine,
il s'agit plutôt de briser le silence qui entoure l'emploi
révolutionnaire de cette «simple mécanique» à «faire voler
les têtes», pour mettre au jour, dans leur origine conjointe,
la répulsion qu'inspire la machine et la réputation qu'elle
s'est gagnée : son abject prestige.