Ce septième recueil d'Yves Gasc se présente tel un tryptique, sorte de journal intime du poète, éternel voyage initiatique entre l'Occident vécu et l'Orient comme rêvé, quoique concrètement habité.
Dans la première partie, les « Poèmes de la terrasse » sont à la fois complainte de la solitude, quête de soi dans ce vide et attente de l'être privilégié. La terrasse de Paris où cette attente a lieu devient presque un personnage, un témoin sensible. Souvenirs de l'enfance, d'un vécu multiple, révolte contre le désir dominateur. Cette réflexion lyrique s'attarde aussi sur l'acte d'écriture. Nous sommes un « réseau d'offrandes ». Calmons notre inquiétude avant le retour de « ce visage et nul autre », dans le regard duquel « on prend le large ».
Les « Poèmes du patio », en deuxième partie, chantent la présence de l'aimé, le défi de l'amour unique, le silence positif. Voici de fortes images sur la solitude, malgré le souvenir, par moments encore, de « la fête barbare ». Décision mûrement réfléchie : « Ne pas recevoir, seulement donner ! Tel est l'amour. » Sur toute chose perdure cependant « l'ombre de la mort ».
En troisième partie, « Khalîl », sur le mode oriental revisité, salue l'aimé mystérieux qui se confond avec l'image du Seigneur. Le chant d'éloges, tantôt charnel, tantôt épuré s'élève, évocation, supplique, partage d'infini. « Il n'y a qu'en toi que repose la paix ». Est-ce un crime que de trop aimer ? Ne faut-il pas craindre aussi « la nuit de l'âge » ? Le poète s'imagine mort, sa main apaisée dans celle de l'amour.
Donjon de soi-même (1985) évoquait surtout les souvenirs d'une vie. Travaux d'approche (1999) livrait l'homme aux quatre éléments, non sans une fringale d'exil. Ici, le partage de l'amour nivelle les doutes et les phantasmes dans une écriture d'une riche simplicité.