Pour la première fois en France, traite négrière et esclavage font la
une des journaux, sont débattus dans les médias et suscitent des
controverses. Deux questions s'imposent : pourquoi le débat
public est-il si tardif ? Et pourquoi revêt-il un caractère si extrême ?
En revenant sur les termes de ce débat, Françoise Vergès suggère
que la lenteur qui a présidé à cette prise de conscience peut être
analysée comme un point aveugle dans la pensée française. Elle
revient sur les conditions et les causes de l'oubli, pour imaginer
les conditions de son dépassement, sans céder à ceux qui veulent
faire de la mémoire de la traite et de l'esclavage une rente de
situation ou à ceux qui tentent de l'utiliser pour justifier des
dérives populistes.
Le débat montre que la majorité des descendants d'esclaves ne
veulent plus être esclaves de l'esclavage qui fut imposé à leurs
ancêtres. Ils refusent d'être enfermés dans le passé, mais sont
convaincus que, sans un examen et un tri de l'héritage, ce passé
restera un passif, une assignation à résidence.