Souvent méconnus et négligés par la recherche universitaire, les Conseils économiques
et sociaux régionaux sont pourtant des espaces originaux de construction
d'un dialogue territorialisé impliquant, au-delà des seuls partenaires sociaux
traditionnels, la société civile organisée dans sa diversité.
Il faut rappeler que la conception classique de la Démocratie, fondée sur les
principes d'indivisibilité de la souveraineté et d'exclusivité de la volonté générale, a
longtemps empêché, dans notre pays, toute représentation autre que politique et n'a
donc pas favorisé la prise en compte des «corps intermédiaires» et l'émergence
d'institutions consultatives reconnues.
Restituer l'histoire récente de cette représentation à l'échelle de l'Aquitaine, à
l'occasion du 35ème anniversaire du CESR, permet d'abord de mieux saisir la
contribution des socio-professionnels à la mise en place de l'institution régionale
elle-même. Cela permet aussi d'interroger la façon dont ses propres conseillers et
les organisations qui les mandatent se sont progressivement approprié leur rôle et
les mécanismes de cette institution somme toute assez singulière.
C'est à ce double objectif qu'entend répondre la présente étude menée il y a
20 ans mais à ce jour jamais éditée. Ce regard rétrospectif met en perspective les
règles de composition du CESR, ses missions, son fonctionnement mais également
la nature des interactions développées en son sein ainsi qu'avec une assemblée
d'élus politiques alors en pleine quête de légitimité.
Comment la mise en place de l'assemblée socio-professionnelle régionale
éclaire-t-elle la capacité d'influence d'une institution devenue bien plus qu'un
simple observatoire régional ? Comment ce lieu apaisé où s'expriment pourtant
des intérêts économiques et sociaux parfois contradictoires a-t-il pu devenir un
espace où s'élaborent des visions partagées de l'intérêt régional sans se transformer
en assemblée d'experts ?
Au moment où chacun s'accorde sur la nécessité de réduire la distance entre
élus et citoyens, à travers les notions de dialogue social ou de concertation, cette
histoire inachevée illustre précisément l'apport de ce type d'institutions à la vitalité
de notre démocratie.