Le formidable accroissement du Texte et de l'Art qui a résulté de la reconnaissance du statut de l'auteur-artiste à l'âge classique, entité détentrice de droits sur ce dont elle est censée être la «source», pourrait à l'âge électronique s'avérer un obstacle à cette expansion même. Eût-elle optée pour l'idée libre plutôt que pour l'appropriation privative par l'auteur, la littérature occidentale eût sous doute connu un autre destin.
En tant que fiction légale l'auteur-artiste est en effet l'antidote que la culture occidentale a progressivement secrété afin de juguler la menace que le Texte et l'Art font peser sur son autorité. L'excédentisation se confond avec le destin de l'Art en Occident en ce sens que l'artiste et non pas l'Art s'y est imposé comme origine de l'œuvre d'art. De cette situation découle une série de paradoxes dont le moindre pourrait être formulé ainsi : l'artiste est devenu un fardeau pour l'Art, l'auteur un fardeau pour le Texte.
Cet ouvrage s'inscrit dans le prolongement d'une réflexion sur les rapports de l'art et le droit inaugurée par l'auteur dans L'Impunité de l'art, Seuil, 1995.