Herman Melville, sans doute le plus grand romancier américain du XIXe siècle, ne fut pas seulement l'auteur de Moby Dick, mais aussi d'un bon nombre de nouvelles qui sont des chefs-d'oeuvre du genre. Dans ce moule étroit, Melville a coulé toute la profondeur et la richesse d'invention de ses ouvrages plus amples : les deux récits traduits ici nous le montrent à la fois réaliste, épousant le détail et le sordide de l'Amérique moyenne de son temps, et flamboyant, poussant l'écriture jusqu'aux portes du délire. Derrière les saynètes de Melville se profile sans cesse un encyclopédisme kaléidoscopique, qui convoque de multiples aspects de la tradition pour les plonger dans l'acide corrosif du monde moderne. Mélange explosif des genres qui a toujours pour enjeu une improbable transfiguration du réel quotidien : ces récits oscillent entre la jouissance et la résignation comme entre la faillite et le salut.