"Rites, jeux et passages" est le titre choisi en 1976 par l'écrivain argentin Julio Cortazar (1914-1984) pour trois des volumes de l'édition complète de ses nouvelles.
"Rites, jeux et passages" annonce aussi une thématique, celle du fantastique ; le mort qui existe ; la femme méduséenne ; la statue instable ; des animaux non domestiqués mais à demeure ; la distorsion des structures spatio-temporelles. Cette mythologie littéraire du fantastique rencontre l'actualité cauchemardesque ; l'histoire de spectre donne lieu au spectre de l'Histoire, la terreur surnaturelle touche la terreur politique, et l'on passe de l'autel du sacrifice aztèque ou grec, à l'autel de la Sécurité Nationale des régimes prétoriens latino-américains.
Le fantastique est une aporie pour la critique ; comment penser une littérature qui empêche de penser ? Comment parler d'un texte qui s'abîme à mettre en avant la chose, le réel, et à liquider le langage, les causes ?
Julio Cortazar, qui vécut en France dès 1951 et obtint la nationalité française en 1981, a pu être oublié par la critique au profit des autres grands de la littérature latino-américaine. Neuf ans après sa mort, au moment où paraît en français l'intégrale de ses nouvelles, cette étude voudrait entraîner à lire Cortazar ; par jeu, pour trouver un passage, comme un rite où l'on sacrifie tout.