Après la rupture de l'unité de l'Eglise, les problèmes de
conscience individuels ont déclenché les guerres de religion. C'est
pour clore cette période d'anarchie sanglante que la monarchie
institue la raison d'Etat : déchargé de toute responsabilité politique,
le sujet est confiné dans le domaine des convictions morales
privées ; le for intérieur et l'action extérieure, l'homme et le
citoyen font désormais l'objet d'une stricte dichotomie.
Mais, au sein de l'équilibre européen, le jugement des élites
ne tarde pas à affronter les lois de l'Etat. Tout en s'en cachant
- et en se le cachant -, les clubs, les loges maçonniques et la
République des lettres instruisent un procès politique. La critique
des Lumières se conçoit en effet comme souveraine : pour elle,
tout pouvoir de l'Etat est abus de pouvoir.
A l'instar de l'ancienne théologie, la philosophie de l'histoire
annonce le triomphe utopique de la liberté. Tout en continuant à
nier qu'on fait de la politique, on rend inéluctable la révolution.
C'est la crise. Né de la fin des guerres civiles, c'est dans la guerre
civile que l'Etat absolutiste va sombrer en 1789.