Le sentiment d'humanité
Manifeste pour une femme libre
« Mon enfant, ma fille, qu'est-ce qu'être humaine dans un monde déshumanisé ? Mon enfant, ma fille, qu'est-ce qu'être vivant dans un monde pétrifié ?
Toi, mon enfant, ma fille, tu es vivante, et tu le cries. Toi, mon enfant, ma fille, tu es humaine et tu le dis.
Être humaine, mon enfant, ma fille, c'est aimer là où on voudrait que tu aies peur ; c'est transformer la haine en mots ; et les coups en larmes. C'est contre toute violence à l'endroit de la fille, de la femme, être capable d'imposer la douceur. C'est conquérir la tendresse et la douceur, là où il n'y a que mépris et agression. C'est avoir la force du pardon quand nous n'aurions que le goût de la vengeance. C'est dire non, - parfois au prix de la vie - quand on te force à dire oui. Perdre sa vie peut être mieux que perdre son nom.
Mon enfant, ma fille, tu es destinataire d'un monde en lambeaux, mais comme la friche d'une terre à ensemencer, courbe-toi, jusqu'à respirer cette terre, touche-là du bout des doigts et plante tes mains fertiles dans ce terreau qui n'attend que toi. Ne sois jamais impatiente et si la récolte se fait attendre, recommence le geste : baisse-toi et courbe-toi jusqu'à la grâce, et sans l'imposture de la posture, insémine cette terre de ta sincérité et de ta vérité : un monde est à construire, c'est de tes mains - de vos mains - qu'il jaillira. »