L'économie est-elle l'apanage de l'économiste seul ? Y a-t-il
concrètement une frontière extrême entre l'analyse économique des
problèmes pratiques de la cité et la réflexion que le philosophe mène
dans son champ d'investigation, ou les deux ne font-elles pas partie d'un
même ensemble qui porte simplement le nom de pensée tout court ?
Le présent ouvrage tente de répondre à ces questions en recourant
à une méthodologie analytique qui permet de comprendre que les
tentatives des économistes contemporains pour disqualifier la philosophie
du processus d'élaboration des modèles, des lois et des principes
économiques, sous prétexte d'adosser leur science aux procédures
d'expérimentation des sciences empiriques et formelles, sont vouées à
l'échec. Car elles omettent souvent que l'économie et la philosophie ont
un dénominateur commun : l'épanouissement de l'homme et le maintien
de l'équilibre social. Depuis son origine, la philosophie n'a cessé en effet
de dégager les principes pratiques pour conduire les hommes et les cités
au bonheur et à la cohésion sociale. Qu'il s'agisse de Thalès, Xénophon,
Platon et Aristote (dans l'Antiquité), ou d'Adam Smith et G.W.F Hegel (aux
Temps modernes), on se rend bien compte que les philosophes ont apporté
la preuve que, contrairement aux croyances répandues, les problèmes
qu'ils traitent ne sont pas détachés de l'expérience sociale et des intérêts
économiques qui s'expriment à travers les besoins individuels ; mais, au
contraire, qu'ils relèvent du domaine de la vie pratique de la société dont
l'économie n'est qu'un des éléments constitutifs.
Telle est la conviction intellectuelle que ce livre entend promouvoir
en questionnant les racines antiques et les sources modernes de
l'économie.