Le vécu au travail façonne-t-il aujourd'hui les représentations sociopolitiques des individus ? L'enquête qualitative menée au sein de trois groupes professionnels montre que les activités professionnelles alimentent les jugements portés sur la société et la politique. Les ingénieurs conçoivent la hiérarchie sociale et les choix politiques à l'aune de leur formation scientifique, axée vers la technique ou le management. Les agriculteurs se démarquent plus ou moins des loyautés politiques locales selon le type d'agriculture qu'ils privilégient pour assurer leur futur. En politique comme dans leur profession, les DRH valorisent une position de surplomb synthétisant des points de vue antagonistes. Comparant ces « ethos professionnels », l'ouvrage relativise les constats de la dissolution des appartenances professionnelles et de l'individualisation des opinions. Il examine les modalités d'organisation du travail et de la concurrence, les trajectoires et les réseaux de sociabilités pour saisir les logiques de production des opinions propres à chaque groupe et leurs différenciations internes.