Les statistiques de la sociologie de la culture estiment que
seule une minorité de la population serait touchée directement par
les manifestations actuelles de l'art. Mais il semble que l'on doive
renoncer à une stricte opposition entre publics et non-publics :
observer des reproductions de tableaux dans la vitrine d'une
boutique, découvrir des chefs-d'oeuvre comme support publicitaire
dans les pages d'un magazine, faire référence à un film que l'on n'a
pas vu, à un livre non lu... sont autant de situations de la vie
courante par lesquelles la culture légitime fait l'objet d'une
diffusion, d'une actualisation et d'une appropriation par un public
occasionnel, peu impliqué, voire involontaire.
Une analyse de ces situations hors des circuits traditionnels de
la distribution culturelle contribue au renouvellement de la
réflexion sur les notions mêmes d'oeuvre, de publics et de
réception. Entendus de la sorte, les non-publics ne peuvent être
considérés comme des oubliés de la culture, simplement écartés des
dispositifs culturels : ils sont produits par d'autres dispositifs qu'il
convient d'examiner.
Cet ouvrage invite à suivre, dans leur diversité, leur
imprévisibilité et leur originalité, quelques-uns des chemins de
traverse empruntés par les oeuvres d'art.