« Peut-être pourrait-on dire alors qu'un journal intime est un écrit dans lequel quelqu'un manifeste un souci quotidien de son âme, considère que le salut ou l'amélioration de son âme se fait au jour le jour, est soumis à la succession, à la répétition des jours, source de permanence et de variation. Si cette entreprise a une portée spirituelle, tout en se détachant des pratiques religieuses strictes (le journal intime, c'est bien au contraire le signe qu'un individu décide de faire face seul à l'insuffisance de son âme, sans confesseur, sans s'appuyer sur une pratique sur un rite, en réinventant des secours), c'est que celui-ci se place toujours, pourrait-on dire, sous le signe de cette pensée du poète Keats : "Call the world, if you please, the vale of soul-making", "la vallée où se forment nos âmes" (lettre du 15 avril 1819). »
Pierre Pachet, Les Baromètres de l'âme. Naissance du journal intime, 1990.