Au soir de sa vie, Ginny, une vieille femme blanche, conte les terribles événements qui se produisirent, avant la guerre
civile, dans la ferme isolée du Kentucky où, à peine sortie de l'adolescence, elle vécut avec son mari, Linus Lancaster,
individu plus enclin à la bienveillance vis-à-vis de ses porcs voraces qu'envers ses esclaves noirs exploités à merci.
Dès lors que, prenant prétexte d'une hypothétique stérilité de sa femme, Linus se met à abuser sexuellement de Cleome et Zinnia, les deux domestiques noires qui, à peine plus âgées que Ginny, forment sa seule compagnie, l'épouse délaissée, rongée par la jalousie, entreprend de rivaliser avec sa sinistre moitié en matière d'atrocités racistes. Jusqu'à cette aube glaciale où, quelqu'un ayant enfin osé mettre sauvagement un terme aux jours du tyran, la jeune veuve comprend que ses deux esclaves en mesure, à présent, d'assouvir impunément leur vengeance, vont, à leur tour, imposer à leur maîtresse déchue et haïe une
ordalie d'une cauchemardesque cruauté.
Dans ce roman d'une intensité rare, narré à plusieurs voix, Laird Hunt convoque sur un mode hallucinatoire l'une des périodes les plus sombres de l'histoire des États-Unis en érigeant, sur la scène même de toutes les amnésies, une stèle où se donne à lire la partition sans fin de la redoutable réversibilité du Mal.