
Toujours confondus dans le sens commun, sens et signification sont pourtant
des concepts distincts pour la sémiotique qui s'est inlassablement efforcée
d'instruire leurs rapports mutuels. À la façon de Hjelmslev, le sens se laisse
identifier au «matériau» ou au «support» grâce auquel «toute sémiotique en
tant que forme se trouve manifestée». Le sens peut être aussi cette «matière»
informe qui, lorsqu'elle est articulée par l'analyse, devient une signification. Il
précède alors la signification mais reste, sans elle, insaisissable. Pour Kristeva,
la dichotomie témoigne plutôt d'une allégeance affective du sens et du
fondement cognitif de la signification.
Ces quelques données liminaires suffisent à montrer la difficulté à s'accorder
sur une définition restituant à la fois les composantes de la pensée (l'affectif ou
le cognitif) et son mouvement même (une signification ex post s'attachant à
reconstituer un sens ex ante). Surtout, elles révèlent dès l'abord la témérité de
notre projet en donnant raison à de plus sages sémioticiens qui ont pris soin de
«laisser à la porte» (Costantini) l'encombrant couple sens/signification, se
trouvant quittes pour la confusion et vérifiant que cette lacune n'empêchait pas
de mener les études sémiotiques.
S'il semble pour le moins ambitieux, notre projet n'est pourtant pas dénué
d'atouts, notamment parce qu'il tient sa raison d'être de son contexte même.
En effet, examiner sens et signification à l'aune des productions plastiques,
pourrait donner une lumière nouvelle à la compréhension des deux concepts
en profitant, au-delà de la fraîcheur théorique qui vient du déplacement de la
problématique, de la diversité et de la complexité des oeuvres.
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