Le mot hérésie évoquant la rébellion et l'erreur, le titre de Peter L. Berger sonne comme une provocation ou une contradiction. Impératif hérétique ? En vérité, l'étymologie grecque de ce mot renvoie seulement à l'idée de choix.
Pour Berger la condition de l'homme prémoderne était celle de la certitude religieuse, complexe résultat d'un consensus établi et d'une autorité traditionnelle. L'homme moderne vit au contraire dans le doute. Il a le choix. Il n'a pas seulement l'embarras du choix - de l'hérésie - il en a l'obligation. C'est l'impératif hérétique !
Car la modernité désorganise les sociétés traditionnelles et les mondes gouvernés par un destin. Elle pluralise et libère. Elle multiplie les choix possibles.
Ceci n'est pas un livre de dévotion ni de spiritualité.
Je réfléchis sur la pensée religieuse, sur la théologie - non pas sur la foi mais sur la façon dont on pense la foi. En d'autres termes, mon objectif est intellectuel. Les intellectuels ont toujours tendance à penser que l'histoire du monde se résume à l'histoire des idées ; cette erreur provoque une distorsion complète du phénomène religieux. Toute personne engagée dans une recherche religieuse a soif d'affirmations - elle veut pouvoir arriver à dire « Voici ce que je crois ». Le pauvre intellectuel bute dans sa recherche sur des « possibilités » et « impossibilités » bien plus complexes. Il est salutaire (dans le sens le plus littéral du terme) de bien se rappeler qu'en matière de raison du coeur, sur laquelle toutes les proclamations théologiques sont finalement fondées, l'intellectuel n'a pas le moindre privilège par rapport aux autres êtres humains.