Ce roman universellement connu, dont nous donnons ici la première partie, est à la fois un antiroman et le premier des romans modernes. Il associe la simplicité du conte merveilleux ou populaire et de la littérature carnavalesque, avec sa schématisation, sa densité et son symbolisme, ses oppositions claires, à la complexité du réel. Cette complexité paraît dans la multiplicité des narrateurs, l'hybridation des récits, le refus d'une vérité dogmatique, même si Cervantès, qui cultive admirablement l'ambiguïté, fait accéder le lecteur à une réflexion empreinte de sagesse sur l'amour et le sens de la vie. Et si tragique il y a, il naît du comique, d'un comique franc et ravageur, parfois féroce, qui n'épargne rien, ni personne, mais qui reste foncièrement humain.