"Les huit cent vingt ans écoulés depuis la
fondation de Rome jusqu'à cette époque n'ont
pas manqué d'historiens ; et, tant que l'histoire
fut celle du peuple romain, elle fut écrite avec
autant d'éloquence que de liberté.
Mais après la bataille d'Actium, quand le
pouvoir d'un seul devint une condition de
la paix, ces grands génies disparurent. Plusieurs
causes d'ailleurs altérèrent la vérité :
d'abord l'ignorance d'intérêts politiques où
l'on n'avait plus de part ; ensuite l'esprit
d'adulation ; quelquefois aussi la haine du
pouvoir.
C'est que la flatterie porte le honteux
caractère de la servitude ; la malignité plaît
par un faux air d'indépendance.
J'ai réservé pour ma vieillesse un sujet
plus riche et plus paisible, le règne de Nerva
et l'empire de Trajan, rares et heureux
temps, où il est permis de penser ce qu'on
veut, et de dire ce qu'on pense.