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Personne n’avait jamais donné la parole à Hélène. Hélène de Troie, Hélène de Sparte, plutôt. C’est qu’à la frontière du Mythe et de l’Histoire, Hélène était un personnage trop commode pour qu’on ne lui attribue pas, sans qu’elle puisse se défendre, tous les défauts que les hommes prêtent aux femmes : la frivolité, le mensonge, l’insouciance, l’infidélité, l’égoïsme... D’où les légendes des poètes, et une certaine façon de raconter Hélène. L’Hélène de Sophie Chauveau n’est rien de tout ce que l’on dit. Sensuelle, oui (elle nous le montre), et belle comme nulle mortelle ou déesse n’a pu l’être, mais femme de tête, aussi, et tête politique. De la guerre de Troie (qui ne dura pas dix ans mais trois mois et fut un choc de civilisations), elle aurait voulu que naisse une humanité nouvelle, les deux sexes égaux, où n’auraient cours ni la rigueur du matriarcat originel ni la férocité de l’âge de fer masculin qui devait lui succéder et dans lequel les hommes plongèrent avec délices, sous le faux prétexte de l’inconduite de la reine de Sparte. Brillant, talentueux et séduisant comme Hélène, le roman de Sophie Chauveau s’appuie à la fois sur une rêverie inspirée et sur des années de travail. Hélène, la Grèce antique et la naissance d’un monde où nous pataugeons toujours en sortent rajeunis, plus profonds, plus vivants, plus passionnants.