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Pourquoi se risquer, aujourd’hui, dans un éloge vibrant de Mirabeau ? Et pourquoi célébrer, à l’heure des déferlantes populistes, un tribun réputé pour son tempérament, sa petite vérole et son jeu plus ou moins trouble entre une monarchie agonisante et une Assemblée Constituante découvrant les vertus du parlementarisme ? Sans doute parce que Mirabeau fut, en son temps, le seul homme politique qui aurait pu « arrêter la révolution » (l’expression est de François Furet) ; qui aurait pu, par son talent de démiurge et sa position d’aristocrate rallié aux principes nouveaux , prévenir la Terreur et réconcilier l’Ancien Régime avec la Révolution. Sa mort prématurée (en avril 1791) coïncida avec le basculement de la France dans une tourmente – qui fut, en même temps, la matrice du pire et le creuset de notre modernité politique. C’est cet homme-là qu’Alain Minc fait ici revivre : de sa folle jeunesse à sa passion interdite pour Marie-Antoinette, des vaines réformes de Necker à celles de Calonne, de ses dettes ruineuses à l’invention de la Monarchie Constitutionnelle, de sa prétendue « corruption » à son amour de la vie, de ses séjours en prison à son rôle majestueux lors de la réunion des Etats Généraux. Au fil de cette évocation, se dessine, en filigrane, un idéal politique : que se serait-il passé si cet homme avait pu poursuivre son œuvre ? La France serait-elle devenue une sorte d’Angleterre ? Et les Français auraient-ils alors pris goût à ce « réformisme » auquel ils semblent, hélas, allergiques ?