Parmi les sciences sociales, la géographie fait trop souvent figure
de parente pauvre. Pour (re)conquérir son rôle spécifique et utile de
savoir critique sur l'espace social, elle doit radicalement revisiter ses
fondements épistémologiques et philosophiques.
Ce livre se propose d'y contribuer à partir des mouvements sociaux-populaires
brésiliens, ruraux et urbains, de 1985 à nos jours. Il décrit
d'abord 30 ans de mobilisation du Mouvement des Sans-terre (MST)
pour la réforme agraire. Il en souligne les difficultés et les limites,
avant comme après l'accession au pouvoir du président Lula, en 2003.
Ensuite, partant d'une interrogation initiale sur la «géographicité»
des mouvements sociaux, sont présentés les jalons d'un parcours
intellectuel de plusieurs décennies, aboutissant à la notion de
mouvement socioterritorial. Fruit d'une élaboration avec le géographe
brésilien B.M.Fernandes, est ainsi proposée une conceptualisation
des mouvements socio-géographiques en termes de mouvements
socioterritoriaux. Elle repose sur de nombreux travaux et références,
géographiques et philosophiques, qui vont de H. Lefebvre à E. W. Soja,
en passant par M. Foucault.
Enfin, l'ouvrage s'intéresse aux grandes manifestations urbaines de
juin 2013 dans un Brésil en crise économique, politique et institutionnelle.
Elles conduisent à s'interroger : qu'est-ce qui fait qu'un mouvement
populaire naît, grandit, s'ancre durablement dans les territoires,
rassemble et réussit ? Ou, au contraire, périclite et, finalement, régresse
et disparaît ? Comment surmonte-t-il ou non «l'épreuve de l'espace»
pointée par Henri Lefebvre ?