Né en Gaule Narbonnaise, le plus grand des historiens romains
a vécu entre la seconde moitié du Ier et le début du IIe siècle Une
période sombre durant laquelle se succèdent à la tête de l'Empire
des souverains fous et sanguinaires, comme Tibère, Caligula et
Néron, et des empereurs plus respectueux de la morale et du
peuple, tels Vespasien, Titus et Domitien.
Historien, Tacite l'est à part entière. Il s'appuie sur des
informations vérifiées, évitant les deux écueils principaux qui
menacent la relation exacte des faits : la flatterie et la haine du
pouvoir. C'est aussi un portraitiste admirable de précision et de
vitalité, un moraliste au patriotisme intransigeant qui dénonce
les turpitudes des empereurs comme celles de la plèbe, un conteur
dont les évocations de la Rome antique restent inégalées.
Tacite s'est mis tardivement à la composition littéraire, vouant
d'abord son talent à l'art oratoire. L'oraison funèbre qu'il consacre
à son beau-père, La Vie de Julius Agricola, est un véritable manifeste
politique contre le régime. Dans le Dialogue des orateurs, il traite
des problèmes de fond et de forme liés à l'exercice de l'éloquence.
Ces premières oeuvres et la suivante, De la Germanie, ont pour
trait commun une analyse riche et documentée de l'histoire de
son temps ; les trois livres sont présentés ici dans de nouvelles
traductions de Catherine Salles. Suivront Les Histoires et Les
Annales, sommes fondamentales dans lesquelles transparaissent
les deux préoccupations majeures de l'auteur : la dégénérescence
du pouvoir impérial et la menace étrangère aux frontières.
Cette édition des oeuvres complètes de Tacite témoigne de la
vigueur et de la puissance stylistiques d'un écrivain que Racine et
de Gaulle, notamment, considéraient comme un de leurs maîtres.